Contrairement aux dépenses de fonctionnement analysées dans notre article publié le 15/06/2023, les dépenses d’investissement ont un impact sur le patrimoine de la ville : acquisition d’un bien nouveau (véhicule, matériel informatique…), construction d’un nouvel équipement (comme les vestiaires du rugby), rénovation approfondie par exemple thermique d’un bâtiment (pas des dépenses de simple entretien qui sont comptabilisées comme des dépenses de fonctionnement), remboursement du capital des emprunts (les intérêts sont quant à eux comptabilisés en dépenses de fonctionnement).
Le financement de ces dépenses d’investissement sera analysé dans un article ultérieur mais repose essentiellement sur quatre piliers :
– Autofinancement : cela correspond à l’excédent des recettes de
fonctionnement de la ville par rapport à ses dépenses de fonctionnement ;
– Emprunts : contrairement à l’Etat, les communes ne peuvent s’endetter que pour financer des investissements et pas des dépenses de fonctionnement courant ;
– Subventions d’investissements (Etat, Région, Département, Vallée Sud Grand Paris…) ;
– Fiscalité : la taxe d’aménagement payée par les promoteurs immobiliers au moment de la délivrance du permis de construire est une recette affectée à la section investissement qui ne peut donc pas être utilisée pour des dépenses courantes.
Depuis sa première élection en 2014, le Maire a régulièrement souligné :
– L’état présenté comme déplorable du patrimoine municipal laissé par son
prédécesseur ;
– La nécessité d’accroitre durablement les investissements de remise aux
normes de ce patrimoine et de réalisation d’équipements nouveaux.
Malheureusement, il n’a jamais démontré la véracité de ses affirmations ni engagé réellement ce plan de rattrapage.
Sur l’état du patrimoine municipal en 2014, il avait fait réaliser un audit technique et financier mais sans jamais en publier les résultats complets et exhaustifs. Il avait juste repris quelques extraits du rapport complétement sortis de leur contexte (*).
Sur le plan de relance de l’investissement par la municipalité, les chiffres officiels des comptes administratifs 2013 (dernière année pleine du mandat de son prédécesseur) et 2022 montrent qu’il n’en est rien.
En euros courants, les dépenses réelles d’investissement de l’année 2022 sont déjà inférieures de 5% à celles de l’année 2013. Une fois corrigés de l’inflation observée sur la période (13,5% selon les chiffres de l’INSEE), ils ont effectivement baissé de 17,6% sur la période, soit une diminution de près de 1,5 M€.
Pour être totalement justes, il faut aussi tenir compte du fait que la voirie communale ayant été transférée à Vallée-Sud-Grand-Paris, les investissements concernant les travaux de voirie ont été sortis des comptes de la ville. Le montant exact de cet investissement n’est pas précisément connu mais il se situe autour de 800 k€ / 1M€ par an.
Par conséquent, même en ajoutant aux investissements réalisés par la commune en 2022 ceux relevant désormais de la compétence de Vallée-Sud-Grand-Paris, l’investissement public sur Fontenay en euros constants a diminué de 0,5 M€ entre 2013 et 2022.
Il convient aussi de mettre en exergue le faible taux d’exécution (la dépense réelle par rapport à la prévision budgétaire) des investissements par manque de pilotage de ceux-ci par la municipalité.
Dans son rapport, la Chambre régionale des comptes d’Ile-de-France a d’ailleurs souligné ce faible taux d’exécution qui est compris entre 47% et 65% depuis la première élection du Maire actuel. A titre de comparaison, ce taux est de 97% pour les dépenses de fonctionnement.
La Chambre régionale des comptes d’Ile-de-France souligne également que ce taux bas chaque année conduit à s’interroger sur le calibrage des investissements, le réalisme des dépenses programmées ou les capacités de la maitrise d’ouvrage de la municipalité.
À titre d’exemple : les prévisions budgétaires 2023 affichent un montant d’investissement de 11,9 M€, soit près de 50% de plus que le réalisé 2022 (8 M€), ce qui expliquerait la nécessité d’augmenter la taxe foncière. Mais si le taux d’exécution n’est que de 65% (valeur haute relevée par la Chambre régionale des comptes), la dépense réelle ne sera que de 7,7 M€, soit moins qu’en 2022…
A noter qu’en outre le coût des projets d’investissement conduits par la ville est en dérive quasi systématique. Sur la base de la présentation faite au Conseil municipal du 9 avril dernier, cette dérive atteint en moyenne 30%.
Cela signifie en pratique qu’environ 30% du budget d’investissement de la ville n’est pas utilisé pour améliorer le patrimoine ou le service public dans notre commune mais uniquement pour compenser les défaillances de l’équipe municipale dans le pilotage de ses projets d’investissement.
En conclusion, la ville de Fontenay-aux-Roses n’a pas augmenté ses dépenses d’investissements depuis 2013 contrairement aux affirmations du Maire, a du mal à réaliser les investissements prévus au budget et doit faire face à des surcoûts importants de ses projets faute de s’être dotée d’une véritable équipe de maitrise d’ouvrage.
Sonia Gouja, Léa Poggi, Michel Giraud, Xavier Limage et Gilles Mergy
(*) : Ce qui pose la question de la teneur générale du rapport, certainement bien moins catastrophique qu’annoncé. Il est par ailleurs regrettable que les Fontenaisiens, qui ont financé l’audit par leurs impôts, n’aient pas pu accéder à ses conclusions.
Très bon article, très pédagogique. Ce serait bien que cette analyse soit faite pour chacune des communes du Territoire VSGP et qu’un partage des analyses et expériences soit fait afin de faire progresser chacune des communes du Territoire.
Merci aux spécialistes de cette question ardue où nous nous faisons facilement enfumer par les majorités en place.